K E L K I N
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Depuis dix ans, je m’engage dans la création d’une série d’œuvres à la fois complexes et labyrinthiques. Cette série dépasse la simple collection d’œuvres ; elle est devenue une partie de moi, un véritable sentiment incarné. Chaque pièce est comme une phrase articulée sur différents supports, une tentative de donner forme à mes pensées les plus profondes…
Cette série est une réponse à mes questionnements intérieurs. Le processus de création me plonge dans un état méditatif profond. Sans utiliser de schémas ou de croquis préparatoires, je laisse ma main s’exprimer librement, sans savoir où cela me mènera. C’est un cheminement intuitif, presque instinctif, où chaque coup de pinceau ou de crayon est une exploration de mon essence.
Les œuvres que je crée visent à représenter la métaphysique humaine, traçant les parcours sinueux de nos âmes. Elles posent des questions fondamentales sur nos aspirations profondes, nos rêves intimes et le sens de nos existences. Le motif du labyrinthe, souvent présent dans mes œuvres, évoque à la fois le plaisir ludique et le sentiment d’égarement.
Cependant, n’est-ce pas en nous perdant parfois que nous découvrons notre propre chemin ?
Cette dualité entre la quête de sens et l’exploration de l’inconnu anime mes créations et les rend si captivantes. Mon approche artistique est résolument minimaliste. Mes créations se déploient comme des espaces philosophiques où chaque élément est soigneusement pensé et réduit à l’essentiel. Avec peu de matériel, je crée des œuvres qui aspirent à une universalité, capables de toucher et de susciter la réflexion chez un large public.
Pour moi, le minimalisme va bien au-delà d’une mode ou d’une tendance artistique. C’est une philosophie profonde qui questionne notre rapport à la consommation, à la matérialité et à la préservation de notre planète. En réduisant les éléments superflus et en privilégiant la simplicité, le minimalisme nous pousse à repenser notre mode de vie pour adopter une approche plus durable et respectueuse de l’environnement. Ainsi, chaque choix artistique que je fais est motivé par cette conscience écologique. Je m’efforce de créer des œuvres qui captivent par leur simplicité et leur universalité, tout en sensibilisant le public aux enjeux environnementaux actuels. Le minimalisme dans l’art devient ainsi une forme d’expression engagée, un appel à l’action pour une planète plus durable et harmonieuse.
Différents types de labyrinthes :
- Le labyrinthe unicursal, issu de la mythologie grecque, dont le parcours de l’entrée au centre ne compte pas d’impasse. Si on le déroule, on obtient un fil unique, d’où la légende du fil d’Ariane qui permit à Thésée de retrouver son chemin dans le labyrinthe de Minos.
- Le labyrinthe maniériste, qui, déroulé, ressemble à un arbre binaire où toutes les voies sont des impasses sauf une. C’est un parcours d’interrogation et de tentative d’erreur, mais qui possède une rationalité immanente.
- Le labyrinthe en rhizome, qui représente une forme unique de complexité et de connexion. Dans ce type de labyrinthe, les voies se tissent de manière entrelacée, créant un réseau infini où chaque point est lié à divers autres points. Ce réseau n’est pas figé ; de nouveaux liens peuvent constamment se former, permettant une exploration sans fin.
Cette structure offre une liberté remarquable. Chaque chemin emprunté est valide, et chaque bifurcation offre de nouvelles possibilités. Il n’y a pas de voie prédéterminée à suivre, mais plutôt une multitude de chemins à découvrir. Cette flexibilité reflète la nature changeante de nos vies, où chaque décision ou expérience ouvre la voie à de nouvelles opportunités et connexions.
Je me suis retrouvé à concevoir la plupart de mes labyrinthes sous cette forme particulière. Sans m’en rendre compte au début, j’ai commencé à les dessiner comme des rhizomes, une métaphore de nos parcours de vie. Ces labyrinthes incarnent nos chemins sinueux, nos projets réalisés ou à venir, nos doutes et nos émotions fluctuantes. Comme dans la vie réelle, chaque intersection offre un choix, chaque détour une leçon, et chaque nouvelle connexion une perspective différente. En fin de compte, les labyrinthes en rhizome invitent à explorer les multiples facettes de l’existence humaine et à embrasser la diversité de nos expériences.
Le motif du labyrinthe peut communiquer des perspectives différentes selon l’interprétation, ce que je trouve particulièrement poétique. Il a des vertus initiatiques et philosophiques, nous inspirant à repenser nos vies et nos rêves. Il en va de même pour nos interactions sociales, notre rapport à l’histoire, la pensée, les états et le monde. Personnellement, chaque labyrinthe que je crée, toujours différent, me permet de prendre conscience de mes interrogations et de mes avancées.
Le labyrinthe est pour moi l’emblème parfait de l’humain, de nos consciences, de nos rêves, de nos désirs et de nos idées. Il est comme l’ADN de nos vies, de notre cheminement personnel. Il contient à la fois l’amusement d’un jeu d’enfant et la complexité de notre univers. Il est également le représentant des enjeux sociétaux et humanistes de notre monde, l’ambassadeur du parcours de l’humanité pour un monde plus juste, équilibré et pacifique.
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Kelkin 2024

« Plan de Paris »; acrylique sur toile de coton, 100 x 100 cm, 2023.
Kelkin
